MUMBAI, MODERNITES, INEGALITES

Etude de cas p.324-331

Bombay (Mumbai depuis 1996 en langue marathi, État du Maharashtra) représente 12,5 millions d’habitants dans la Municipalité, 21 millions dans l’agglomération (l’une des principales mégapoles mondiales).

Située sur une presqu’île sur la mer d’Oman, la ville est bâtie sur une lagune et sept îles réunies par les Britanniques. C’est la porte d’entrée de l’Inde pour les Britanniques, d’où démarre le réseau ferré dont ils dotent les Indes coloniales. Remarquable site portuaire (à l’origine c’est une création portugaise, britannique depuis 1661). La ville connaît une croissance avec l’ouverture du canal de Suez (1869).

En quoi le cas de Mumbai est-il révélateur à la fois du dynamisme économique de l’Asie du Sud et de l’Est et des profondes inégalités qui affectent cet espace ? Quelles sont les dynamiques de cette métropole mondiale émergente ?

I- Une métropole mondiale vitrine de l’Inde émergente

A°/ Mumbai capitale économique de l’Inde (p.324-325)

→ 2e métropole de l'Union Indienne, Mumbai est la ville la plus riche du pays : 4% du PNB, ¼ de la production industrielle, 50% du commerce extérieur, 1/3 de la collecte des impôts.

→ La ville concentre de nombreuses activités tertiaires et une capacité économique décisionnelle unique en Inde grâce à la présence des sièges sociaux des plus grandes entreprises indiennes.

→ Mumbai est au cœur des opérations financières (70% des transactions financières de l’Union Indienne) : Cf. le BSE (Bombay Stock exchange), actif depuis 1875 (la bourse la plus ancienne d’Asie) connu aussi sous le nom de Dalat Street, qui établit l’indice India Sensex 30 la puissance financière.

→ Mumbai est un des plus importants pôle d’enseignement supérieur en Asie, considéré comme le hub de la recherche indien : Institut indien de Technologie de Mumbay (IIT-B) , Institut Tata pour la Recherche Fondamentale (ITFR), un centre de recherche atomique, des organismes de recherches sur les TIC, etc.

→ Carrefour portuaire ferroviaire, autoroutier, Mumbai dispose d’importants équipements portuaires et aéroportuaires (Hub : bicéphalie avec Delhi).

B°/ Une métropole mondiale émergente

→ L’activité économique s’inscrit dans la continuité du capitalisme indien né pendant la période de colonisation britannique.

• Ex . De l'entreprise Tata établie à Mumbai depuis 1859. Industrie sidérurgique indienne dirigée par un entrepreneur indien J.N. Tata (Jamsetji Nasawanji Tata). Parti de Bombay, c'est aujourd’hui un groupe global, mondialisé par Ratan Tata : il pèse 2,5% du PIB indien, et constitue un conglomérat hétéroclite : Hôtels de luxe, automobile, téléphonie mobile, thé (rachat de Tetley), informatique.

→ Mumbai, capitale du cinéma indien. Mumbai est un pôle cinématographique et télévisuel (Bollywood), ce qui lui confère une fonction culturelle importante, et un large rayonnement en Asie et au-delà (diaspora indienne, notamment au Royaume-Uni), et font de la ville un symbole de modernité pour les pays du Sud.

→ Une ville qui profite de l'externalisation des activités (doc.9 p.327) : la sous-traitance par les FTN de nombreuses activités sont un facteur de croissance et d'intégration de la ville au processus de la mondialisation : développement des «call-centers » anglophones, (popularisés par le film « Slumdog Millionaire »), mais aussi activités « haut-de-gamme » dans le domaine de l'informatique (développement, animation, jeux vidéos), de la finance...

→ La notoriété de Mumbai, la concentration de pouvoir économique et financier qu’elle présente, en ont fait en 2008 la cible d’attentats islamistes (200 morts environ) qui ont eu un retentissement mondial.

→ Une ville qui profite de l'externalisation des activités (doc.9 p.327) : la sous-traitance par les FTN de nombreuses activités sont un facteur de croissance et d'intégration de la ville au processus de la mondialisation : développement des «call-centers » anglophones, (popularisés par le film « Slumdog Millionaire »), mais aussi activités « haut-de-gamme » dans le domaine de l'informatique (développement, animation, jeux vidéos), de la finance...

→ La notoriété de Mumbai, la concentration de pouvoir économique et financier qu’elle présente, en ont fait en 2008 la cible d’attentats islamistes (200 morts environ) qui ont eu un retentissement mondial.

 II- Les effets de la métropolisation

A°/ Centres anciens et nouveaux (doc.6 p.326)

→ Du fait de ses fonctions métropolitaines et de ses nombreux échanges avec l’extérieur, Mumbai connaît une croissance économique forte, qui se lit dans l’organisation de l’espace urbain…

La population de Mumbai a quadruplé au XIX^ème siècle, également marqué par de grands travaux d’assèchement, de remblai pour relier les sept îles entre elles. La croissance démographique est particulièrement forte à partir des années 1950 : en 2013, Mumbai est la 5^ème agglomération la plus peuplée au monde. La municipalité est constituée de la ville-centre et de ses banlieues (intégrées dès 1960). L’ensemble forme aujourd’hui une puissante région métropolitaine, marquée par un déclin démographique de la ville-centre amorcé dès les années 1960.

→ L’évolution de la ville-centre de Mumbai liée au renforcement de ses fonctions de commandement s’accompagne de la hausse du prix de l’immobilier et de la verticalisation des quartiers centraux. Cela se traduit :

- par des aménagements spectaculaires : Cf. les tours du CBD de Narinam Point La puissance financière, les malls…

- par la tertiarisation et gentrification du centre : usines déplacées vers la périphérie et montée en gamme des activités économiques (de l'industrie aux services, finance, haute technologie...), convoitise immobilière (avec fortes résistances) sur les bidonvilles, installation des classes moyennes et supérieures ;

- par le développement de nouveaux centres d’affaires, comme Oshiwara, et surtout Bandra Kurla Complex (BKC) (doc.8 p.327), aménagé dans les années 1980, qui accueille des grands hôtels, des consulats, la bourse aux diamants, la Banque centrale.

→ Un étalement urbain incontrôlé : la croissance de la population a lieu principalement dans les banlieues (10 millions d'habitants = X3 en 40 ans) (doc.4 p.325), provoquant l'étalement de la ville sur les espaces naturels et agricoles (ex. grignotage du parc national Sanjay Gandhi).

B°/  Le MMRDA, acteur de gouvernance incontournable et ambitieux

- Les autorités ont défini à la fin des années 1960 une région métropolitaine immense qu’ils s’efforcent d’organiser, par exemple en implantant des villes nouvelles. Aujourd’hui, la métropole se présente comme un vaste territoire composite, partiellement aménagé de manière administrée, partiellement aménagé de façon anarchique.

→ Dans ce contexte, la Mumbai Métropolitan Regional Development Authority (MMRDA) est un acteur incontournable, chargé de concevoir et de planifier la politique urbaine.

• Achat et revente de terrains

• Aménagement des transports :

  • construction de l'aéroport international Navi Mumbai ;

  • métro et le métro aérien qui doivent compter 8 lignes d’ici 2020 pour surmonter les problèmes de saturation des trains de banlieue dans un contexte où les transports en commun totalisent 88% des 12 millions de déplacements journaliers,

  • construction du pont maritime de Bandra-Worli Sea Link (doc.1 p.324)

→ Une lutte contre l'habitat informel : Depuis 1995, les autorités affichent une volonté politique de faire disparaître les slums. Le SRS (Slum Rehabilitation Scheme), qui associe le MMRDA à des acteurs privés, a conduit d’importants programmes de destruction mais peine à reloger les personnes déplacées : pour l’heure seulement 12% de l’objectif de relogement est atteint

III- Des disparités qui s’accentuent.

A°/ Une métropole marquée par de fortes inégalités sociales (doc.11 et 14 p.329)

→ Mumbai compte une classe moyenne en plein développement et des populations très aisées en raison de la croissance économique importante que connaît la ville et de sa bonne intégration à la mondialisation.

→ Les 2/3 de la population active de Mumbai travaille dans le secteur informel.

=> de fortes inégalités en terme d'alphabétisation d'espérance de vie, d'accès au confort (eau, électricité) (doc.12 p.328)

B°/ Une fragmentation spatiale

→ Des quartiers aisés et occupés par les classes aisées et moyennes sur le littoral.

- ex. du quartier Marine Drive et de Tardeo au Sud où se concentrent les grands projets immobiliers comme la World One Tower, plus grand tour résidentielle du monde où la Antalia Tower (doc.15 p.329), tour la plus chère du monde

→ Plus de la moitié des habitants vit dans des slums regroupant des habitations plus ou moins précaires, de l’habitation « durcifiée » à la hutte. Les slums occupent 15% de la superficie de la ville. Dharavi (doc.14) , avec ses 700 000 habitants sur 200 ha à l’Est de l’aéroport, est le plus grand bidonville du monde, mais la ville compte également d’innombrables « slums pockets », petits bidonvilles faciles à détruire, et objets de spéculation immobilière. ex. de la presqu’île de Worli, port traditionnel au pied du pont Bandra Worli.

=> La ville a grandi anarchiquement depuis plusieurs décennies en raison d’une très vive croissance urbaine, souvent sous la forme de quartiers informels ou d’habitats précaires. Dans ces slums qui regrouperaient aujourd’hui plus de 6 millions d’habitants, l’IDH est plus faible que dans le reste du territoire urbain : concrètement, la population n’y a pas accès aux services de base comme l’eau et les transports, présente de faibles taux de scolarisation, des taux de fécondité, de mortalité, de violences conjugales, etc. plus élevés.

Conclusion

Avec ses 21 millions d'habitants, l'agglomération de Mumbai est aujourd’hui la métropole la plus dynamique de l'Inde. Elle concentre les activités les plus modernes et les plus prestigieuses, abrite le premier port de conteneurs et le premier centre financier du pays, ce qui lui permet d'insérer le pays dans les flux de la mondialisation. Son importante croissance démographique, facteur et manifestation de sa puissance, rend encore plus aigus les contrastes sociaux caractéristiques de l'Inde. L'extrême richesse voisine avec l'extrême pauvreté, et les conditions de vie dans les très nombreux bidonvilles de l'agglomération constituent des freins puissants au développement et à l'épanouissement économique.

Mumbai est une métropole mondiale émergente où les contrastes sociaux restent le principal défi : un cas emblématique du dynamisme économique de l’Asie du Sud et de l’Est et des inégalités qui persistent pourtant sur ce continent, voire même sont amplifiées par cet essor.